Il débarque chez moi pour la fin de semaine. Ça fait cinq semaines que je l'ai vu. Dès son arrivée, je note les changements: les cheveux rasés, le cou plus large et les biceps bien développés. Il me serre dans ses bras en me soulevant de terre, il a toujours aimé faire ça. Je suis contente de le voir, contente qu'il soit là. On installe ses trucs et on part à pied au resto vietnamien. Pendant le souper, on se raconte le nouveau. Il en a long à dire sur l'armée et son expérience. Je l'écoute, je le trouve plus mûr qu'avant. On rentre et on se couche tôt, car il est claqué.
Le reste de la fin de semaine passe vite: on fait quelques courses, il répare ma hotte de cuisine, m'aide à monter mes petites tables IKEA. Dieu que c'est pratique un homme à la maison! Je nous fais du poulet sur le barbecue et malgré l'énormité de la poitrine que je lui ai servi, il dévore tout avec appétit. Le soir venu, on se loue deux films et ce coup-ci c'est moi qui tombe de sommeil avant la fin du second.
Déjà dimanche... on déjeune ensemble. Il fait le tri dans ses affaires, car il laisse le superflu chez moi, et refait ses bagages. Je trouve toujours dur de le voir s'en aller: j'ai envie qu'il parte, j'ai envie qu'il reste. On s'embrasse et on se sert fort, il dit merci et s'en va avec son linge tout propre qu'il a lavé pendant le week-end. Dans sa poche, les clés de l'appartement de sa grande soeur à Montréal...
Il va probablement revenir quelques fois d'ici à septembre pour profiter de ma laveuse et dormir des nuits de douze heures sur mon futon!
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Mon petit frère en est à sa sixième semaine au camp de recrues des Forces Armées Canadiennes à St-Jean-sur-Richelieu et c'était sa première permission. François et moi sommes très différents, et sa décision de s'enrôler n'est pas facile à accepter, mais je la respecte. Depuis qu'il me l'a annoncée, j'ai un nouveau détecteur pour les gens qui ne m'aiment pas vraiment: quand je parle de mon frère dans l'armée, ces gens-là vont me sortir le mot "Afghanistan" dans un délai proportionnel à leur sympathie envers ma personne. C'est pratique pour savoir qui sont vos vrais amis. Ceux qui me connaissent savent que de toute ma famille, c'est mon frère qui est la personne la plus importante à mes yeux, qu'étant l'aînée je l'ai toujours protégé un peu, que je ne veux que rien de mal ne lui arrive, jamais. Et comme ils savent cela, on ne me parle pas de l'Afghanistan avant que j'en parle.
Le plus beau cadeau que mes parents m'ont fait, c'est de me donner un frère à aimer.
1 commentaires:
Je suis touchée par ton post... Je suis militaire aussi et j'avoue que j'avais pas vraiment pensé aux émotions de ma famille par rapport à mon métier. On s'imagine souvent être seuls à vivre des émotions...
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